vendredi 20 février 2009

20 février la bombe suite II


Un des suspects dans l'opération Axe contre le crime organisé, Pasquale Mangiola, accusé de trafic de drogue, est un grand ami des frères Andrei et Sergei Kostitsyn, deux joueurs du Canadien de Montréal, a appris La Presse de plusieurs sources policières.

Au lever du jour, le 12 février, les enquêteurs de la police de Montréal ont frappé chez Mangiola, 38 ans, comme chez une cinquantaine d'autres suspects, pour lui passer les menottes. Il fait face à six accusations de complot, de possession et de trafic de cocaïne, ainsi que de port d'arme à feu prohibée.

Selon la police, Mangiola était un intermédiaire entre les trois gangs criminels ciblés dans le projet Axe, soit le gang de rue des Bleus, le gang des Syndicate et le groupe criminel des frères Lavertue, présent dans le sud-ouest de Montréal. Tous ces groupes sont à la solde des Hells Angels.

Pasquale Mangiola est soupçonné d'agir au nom du chef emprisonné du Syndicate, Dany Cadet-Sprince. Ce dernier a été arrêté, en prison, dans cette opération.

C'est par hasard que les policiers ont découvert cette amitié entre Mangiola, grand fan de hockey, et les deux joueurs du Canadien de Montréal. Il parlait plusieurs fois par semaine à Sergei et Andrei Kostitsyn, selon les preuves de filature et d'écoute téléphonique obtenues pendant l'opération Axe.

Mangiola et les deux Frères K, comme sont surnommés les deux joueurs, étaient souvent vus faisant la fête ensemble dans des bars et restaurants huppés du boulevard Saint-Laurent à Montréal. Mangiola allait parfois les cueillir au Centre Bell, après des matches.

Sous son aile

Selon nos sources, Mangiola jouait un rôle important dans la vie du duo. Il avait pris les frères Kostitsyn sous son aile, les guidant dans les aléas de leur vie de nouveaux arrivants à Montréal, les conseillant pour trouver logement et voitures. Mangiola avait aussi accès aux relevés de cartes de crédit des deux joueurs. Il faisait des achats pour eux. Et, bien sûr, il discutait passionnément de questions reliées au Canadien et au jeu des deux attaquants.

Des centaines de conversations de Mangiola ont été enregistrées à son insu dans le cadre de l'opération Axe. Les frères Kostitsyn faisaient fréquemment appel à Pasquale Mangiola quand ils avaient besoin de quelque chose. Comme des bouteilles de vodka, des voitures de luxe, des femmes ou autres.

Plein de contacts, Mangiola se faisait un plaisir de combler rapidement toutes ces demandes.

Jusqu'à son arrestation, Mangiola agissait un peu comme un homme à tout faire auprès des frères Kostitsyn. Un jour, la voiture d'un des joueurs a été endommagée. Il en a informé Mangiola. Celui-ci s'est occupé de l'affaire rapidement, en s'assurant que les réparations allaient être faites.

Des documents intrigants

Au cours d'une perquisition reliée à son arrestation, les policiers ont aussi découvert que Mangiola était en possession de documents financiers au nom des frères Kostitsyn. Les rapports étaient frappés du logo du Canadien.

Que faisait Pasquale Mangiola avec de tels documents appartenant à deux joueurs de la LNH?

Impossible de le savoir : le Canadien de Montréal n'a pas voulu commenter les informations de La Presse, hier. L'agent des deux joueurs, Don Meehan, a affirmé à notre collègue Richard Labbé ne pas connaître Mangiola (voir autre texte en page A5).

Les policiers ont aussi découvert qu'un autre joueur du Canadien, le défenseur Roman Hamrlik, orbitait dans l'entourage du trio. Hamrlik a aussi été vu dans des bars du centre-ville avec Mangiola. Le défenseur tchèque n'était cependant pas aussi proche de Mangiola que l'étaient les frères Kostitsyn, selon nos sources.

Soupçonnés de rien

D'après ce que La Presse a appris, les deux jeunes vedettes du Canadien ne sont soupçonnées d'aucune activité criminelle. Même chose pour Hamrlik.

Depuis quelques jours, le Canadien de Montréal est en pleine tourmente, sur la glace et hors de la glace. Le club ne gagne plus et doit composer avec des rumeurs persistantes touchant de jeunes joueurs très actifs dans les boîtes de nuit, au point de déranger leurs performances sportives.

Selon les informations obtenues, le club de hockey Canadien a été mis au parfum du fait que les frères Kostitsyn avaient de bien mauvaises fréquentations en la personne de Mangiola.

Mardi soir, François Gagnon, qui couvre le Canadien pour La Presse, a demandé au club de hockey une réaction officielle sur les liens entre Mangiola et les deux hockeyeurs biélorusses. Réponse: «Nous ne sommes pas au courant d'une telle association», a répondu Donald Beauchamp, vice-président aux communications.

Quant au renvoi de Sergei, cadet des frères Kostitsyn, au club-école du CH à Hamilton, dans la journée de mardi, M. Beauchamp a dit: «Cette décision est reliée uniquement à des considérations sportives.»

Après cinq jours en cellule, Pasquale Mangiola a pu reprendre sa liberté moyennant une caution de 45 000$. À la demande du ministère public, le juge Michel Belhumeur, de la Cour du Québec, lui a aussi imposé plusieurs conditions, dont le respect d'un couvre-feu, de 23h à 6h le matin.

Les accusations auxquelles fait face Pasquale Mangiola dans le cadre de l'opération Axe sont les plus graves portées contre lui à ce jour, dans son parcours criminel. À la fin des années 90, il a plaidé coupable à une accusation de voies de fait sur un agent de la paix. Dans un autre dossier, il a plaidé coupable à deux accusations de falsification de cartes de crédit.

Chaque année, la police de Montréal rencontre les joueurs du Canadien pour les mettre en garde contre les dangers qui guettent des athlètes professionnels hors de la patinoire. Ces dangers vont de la drogue aux individus criminalisés. La LNH prévient aussi les joueurs, sur une base régulière, que des membres du crime organisé peuvent tenter de se lier à eux.

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